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vendredi 3 septembre 2010

Du désenchantement

J'ai dû vous dire que le voyage en Corse de cette année me voit quelque peu désenchanté. Je reviens d'une vallée qui s'essouffle, où les résidents à l'année, c'est-à-dire les véritables habitants, vieillissent, sont malades, vivotent péniblement. Rien ne vient relancer l'activité économique ni l'activité culturelle, les deux domaines étant, on le sait, étroitement liés.
Je ne sais pas exactement dans quel état se trouve le reste de la Corse. Je sais néanmoins que des pôles restent surchargés de touristes : Porto Vecchio entre autre, la nouvelle coqueluche. Je sais que l'activité touristique se réduit à quinze jours au maximum dans l'année, les quinze premiers jours d'août. Pendant cette période, la Côte Orientale, sur les bords de la mer Thyrénienne, grouille de gens en short et en maillot, fourmille de voitures s'enfilant les unes derrière les autres sur l'axe Bastia (port par où sont déchargés les voitures des touristes)-Porto Vecchio qui se prolonge jusqu'à Bonifacio, autre site littéralement envahi , par les bateaux de plaisance également.
C'est bien cela : la Corse est envahi de gens qui viennent profiter de sa mer, de ses paysages de montagne, de son vin, de sa charcuterie tout à fait particulière (elle est fumée). Les autochtones ressentent cette invasion comme excessive et pourtant le tourisme reste la première activité économique de l'île. Les résidences de vacances fleurissent un peu partout malgré une surveillance vigilante qui empêche jusqu'à aujourd'hui que la Corse se trouve bétonnée sur son littoral comme peut l'être la Costa Brava en Espagne. Les autonomistes veillent d'ailleurs et font sauter une villa par-ci, en incendie une autre par-là. On pourrait parler à ce propos de régulation "naturelle" si tout restait toujours à l'écart de dérives maffieuses de certains mouvements nationalistes.
Mais ce n'est pas tellement de la Corse dans son ensemble dont je veux parler : je ne la connais pas suffisamment. Par contre, cela fait 43 ans que je viens passer un mois ou deux dans la vallée de l'Alézani, une rivière qui coule au fond d'un sillon étroit où l'on ne met jamais les pieds parce qu'aucune route ne la longe. Seuls deux à trois ponts la traversent en certains points. La végétation est en effet très dense sur le parcours du "fiume" (cours d'eau, en corse) et les pentes sont très abruptes. La rivière est donc restée à l'écart des avatars qu'a connu cette région, ce canton même pourrait-on dire pour mieux la cerner. A l'écart si l'on veut car, la plus part des communes qui la surplombent n'a pas de station d'épuration des eaux usées. L'Alésani est un égoût en fait. On n'y trouve plus de truites, plus d'anguilles. L'Alézani est morte, d'autant que ses eaux n'arrivent plus jusqu'à la mer : elles sont maintenant retenues par un barrage de terre qui a été édifié pour irriguer la plaine orientale, celle qui a été défrichée par les réfugiés d'Algérie lorsque celle-ci est devenue indépendante et que les colons français en ont été chassés. Ce qui fait que les salades qui poussent dans les jardins que l'on trouve plus bas, au débouché de la vallée, sont des salades qui recueillent les rejets ménagers et domestiques des gens du haut.
Cela n'émeut pas les autorités. Il y a si peu de population qui souffre de ces désordres écologiques. Et, de plus, ils ne sont pas conscients des dangers qu'ils courent.
Voilà un des points qui alimentent mon désenchantement. Mais il y en a d'autres que je vais développer dans d'autres billets qui viendront en essayant malgré tout de signaler les grandes satisfactions que l'on peut encore ramener d'un séjour sur cette île.
(A suivre)

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