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samedi 21 janvier 2012

"LES ENFANTINES" en BLOG (16)

L'HUILE D'OLIVE  (3)
Voilà pourquoi ma mère, le jour où on lui parla d'une affaire d'huile d'olive a priori fort intéressante, commença par douter. N'avait-elle pas plusieurs raisons de se montrer suspicieuse ? Pour commencer, le prix était anormalement bas. Il est vrai que la condition première du marché était liée à l'achat d'une quantité minimum qui était de cinq litres. On pouvait donc sans s'étonner voir un vendeur baisser le prix de l'unité en même temps qu'augmentait la quantité : c'est une loi fondamentale du commerce à laquelle seuls dérogent aujourd'hui les magnats du pétrole qui augmentent leurs prix au fur et à mesure que s'accroissent les commandes. Mais cela, en 1943, ma mère l'ignorait.


Un autre facteur de trouble, tout aussi ambigu que le premier d'ailleurs résidait dans le fait que cette histoire d'huile d'olive avait été présentée à ma mère par le fameux père de Loule dont on sait qu'il avait échappé à la feuille à nigauds. La notoriété de cet homme, respectable à plus d'un titre, ôtait cependant de l'idée qu'il eût pu se livrer à quelque marché noir que ce soit : il avait bien d'autres chats à fouetter, et c'étaient souvent des dames qui ne s'appelaient pas nécessairement Jeanne. D'autre part, nous étions très liés et il était hors de propos que le père de Loule puisse nous jouer un tour quelconque : il existe dans tous les milieux des codes d'honneur particuliers. Celui du père de Loule lui interdisait d'exercer son art dans les lieux mêmes où cet art lui apportait considération et respect. Et cela, même en 1943, ma mère le savait.



Si l'on pouvait donc exclure d'une part l'idée qu'un piège puisse être tramé par le père de Loule, d'autre part le fait qu'un prix alléchant constitue nécessairement la marque d'un escroquerie, il restait encore quelques inquiétudes à ma mère à cause de ce qui a été dit plus haut au sujet des dames-jeannes....Ou plutôt des bonbonnes. Qui saurait si, dans les trois ou quatre bonbonnes que ma mère escomptait acquérir (afin d'en revendre le contenu litre par litre, bien sûr), il se trouverait vraiment de l'huile ?



- Ah! mais vous pourrez vérifier ! s'était exclamé le père de Loule accompagnant ses propos d'un geste large, saint et ouvert qui faisait voir les blanches paumes de ses mains :

- Et puis vous savez, je n'y suis pour rien, moi. C'est pas moi qui vous la vends l'huile. c'est un collègue, un type qui a une grosse affaire. Et il veut s'en débarrasser assez vite. Vous comprenez pourquoi....

A cet instant, en ponctuation, il y eut le traditionnel guinchement d'oeil qui déclenche toujours l'adhésion et la confiance.

                 ... (suite) ...

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