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mardi 11 janvier 2011

Au milieu des pots de peinture

Au milieu de tout un fatras de meubles protégés et accumulés, de carrelages non terminés, de cartons, de sacs qui nous suivent de pièce en pièce chaque  fois que nous sommes délogés afin que les ouvriers puissent travailler dans un lieu donné, je reçois un coup de fil. Un miracle car, la Hi-box me suivant dans mon nomadisme interne au bout d'un long filin me raccordant à l'univers n'est pas toujours branchée, bousculée par les échaffaudages, interdites ici et là à cause de mille outils bruyants, d'autant d'engins projeteurs ou ponceurs, parfois tranchants ou percuteurs. Un coup de fil qui me fait abandonner mes spatules ou mes pinceaux, petit finisseur des actions lourdes conduites par des hommes puissants mais peu soigneux alors que je suis la finesse, l'adresse, le finisseur en couleurs, la french touche que ne sauraient mener à bien ces hommes pressés sans cesse à la recherche du gain de temps. Hommes de la civilisation du placoplâtre qui va vite, ils ne comprennent pas que je m'applique à rêver sur une fissure, à discourir sur des tons et des ambiances. Ils m'ont même reproché les fils courant le longs de plinthes de ce home cinéma qui va compléter cet immense écran led de chez Sony qui a fait l'merveillement de Nicolas et des autres lorsqu'ils sont venus réveillonner avec nous pour le Jour de l'An. Et pourtant qu'est-ce qu'une maison, un intérieur même soigné et rénové s'il n'est pas habité par le son, l'image?
Et bien au milieu des pots de peinture -car, ça y est, on en arrive enfin à ce stade où je vais pouvoir vraiment oeuvrer en solo- on m'appelle. Une voix africaine et féminine, délicieuse d'accent du Niger, qui m'appelle depuis un éditeur auquel j'avais envoyé mon manuscrit. Elle me relance afin que je me décide à être publié. Quel mot magique PUBLIE! Fou, vous vous laisseriez prendre par cette voix, les dédicaces qui vous attendent aux quatre coins de France dans des librairies obscures et en fin de vie. Le paiement de votre participation en trois versements vous paraît même acceptable. Vous y êtes sur le nuage. Vous dites que c'est à examiner et que vous êtes prêt à accepter cette proposition. Evidemment parce que votre livre pôssède des potentialités et une originalité certaine. C'est le comité éditorial qui le dit.
Mais au milieu des pots et des pinceaux, vous retrouvez notre ordinateur portable. Vous vous empressez d'aller sur les forums où l'on donne son avis sur votre éditeur. Merde! La déception est subite mais attendue en fait : on les connaît ces maisons-là qui encaissent votre "participation" à l'édification de la maquette de votre livre, vous en envoie cinq exemplaires pour vous et puis vous laisse tomber. Pas de promotion, pas de mise en place de la commercialisation. Votre livre n'existera jamais ; il restera vain.
Non, pas vraiment car, même sous sa forme numérique, il témoigne d'un besoin féroce de faire savoir, de raconter, d'écrire, de mettre en scène, de dépasser la vie courante, celle des pots et des pinceaux, des architectes d'intérieur qui ne soignent que l'extérieur de notre être alors que ce qui compte, c'est bien ce que nous portons en nous et qui fait que nous avons une âme. Un petit air, une complainte, deux sous d'harmonies, un zeste de dessin inachevé, une photo réussie, deux mots dits en passant qui sonnent comme un appel, une franche rigolade parfois un peu salée, eh! bien, oui! Même numérique, même dans des cartons, des tiroirs, ce que vous avez produit vous habite, vous crée, vous façonne. Mon aventure romanesque était d'ailleurs si douce à vivre que dans ma tête, pinceaux en mains et allongeant des couches de ma peinture préférée ( la Dulux Valentine!), je prépare un nouveau, un roman complétement nouveau qui s'appellera SCHOOL FICTION.
Vous ne pouvez absolument pas vous doutez de ce qu'il contiendra et encore moins deviner quel sera son argument. Un surprise? Non, une continuité de l'être qui s'exprime et qui ne peut s'en empêcher.

2 commentaires:

  1. Tu connais la même désillusion que des milliers d'auteurs. Ces maisons d'éditions sont des pièges à gogos. Mon amie Rose a connu les mêmes déboires. C'est elle qui est chargée de vendre ses livres. Sa maison d'éditions ne fait pas le travail. Elle ne rentrera évidemment jamais dans ses frais. Courage! Le net est aussi un moyen de publier tes écrits chapitre après chapitre.

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  2. Merci, Quinquabelle. Je te remercie de ton commentaire ; ça me fait du bien. Je ne cèderai pas aux sirènes de Publibook, même si, en l'occurence, elle avait une voix et un accent pleins de charme.
    J'avais essayé de commander par internet le bouquin de ta copine Rose. Le libraire de Grasse n'a jamais donné suite. Mais j'étais averti plud ou moins et tu confirmes mes craintes.
    Comment publier un livre chapitre par chapitre comme tu me l'indiques sur le net? Voudrais-tu être encore une fois mon mentor?

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